Aux termes de l’article 1527 du Code civil, les avantages que l’un ou l’autre des époux peut retirer des clauses d’une communauté conventionnelle, ainsi que ceux qui peuvent résulter de la confusion du mobilier ou des dettes, ne sont point regardés comme des donations.

Littéralement, le texte limite le domaine des avantages matrimoniaux aux seuls régimes de communauté.
Une telle restriction ne pouvait pas cependant se justifier de raisons de fond. En effet, la communauté conjugale peut exister hors le régime de communauté, dans la séparation de biens avec société d’acquêts. Ainsi, la Cour de cassation a pu préciser que l’inclusion d’une société d’acquêts dans un contrat de séparation de biens était constitutive d’un avantage matrimonial (Cass. 1re civ., 29 nov. 2017, no 16-29056).
Pendant le mariage, les époux sont soumis aux mêmes règles que ceux régissant les époux mariés sous le régime de la séparation de biens : l’ensemble des règles de qualification de biens et de pouvoirs sur ces biens leur est applicable.

Cependant, le régime de la participation aux acquêts n’est pas essentiellement séparatiste.
Lors de la dissolution, l’idée communautaire supplante le principe séparatiste et détermine en partie la liquidation du régime. En effet, les acquêts, soit l’accroissement de valeur du patrimoine des conjoints, sont partagés entre les époux, mais ce partage se réalise en valeur et non en nature (C. civ, art. 1569). Pratiquement, lors de la dissolution du régime, bien que les époux aient fonctionné comme en régime séparatiste, une communauté d’acquêts sera reconstituée afin de déterminer la créance de participation de chaque époux aux acquêts du conjoint. Cette reconstitution est cependant fictive : aucune indivision ne se constitue après la dissolution du régime.

En d’autres termes, le régime de participation aux acquêts présente en cours d’exercice les mêmes avantages que la séparation de biens. L’existence cependant d’une créance de participation lors de la dissolution permet de pallier l’un des inconvénients majeurs du régime conventionnel de la séparation de biens, soit l’absence de droit du conjoint en régime de séparation sur les plus-values constatées sur le patrimoine de l’autre époux.
L’originalité de l’institution repose donc sur l’existence lors de la dissolution du régime d’une créance de participation. L’évaluation de cette créance suppose une comparaison (et par conséquent une évaluation) pour chaque conjoint entre son patrimoine originaire et le patrimoine final.

Patrimoine originaire : Le patrimoine originaire comprend les biens qui appartenaient à l’époux au jour du mariage et ceux qu’il a acquis depuis, par succession ou libéralité, ainsi que tous les biens qui, dans le régime de la communauté légale, forment des propres par nature sans donner lieu à récompense.
Patrimoine final : Font partie du patrimoine final tous les biens qui appartiennent à l’époux au jour où le régime matrimonial est dissous, y compris, le cas échéant, ceux dont il aurait disposé à cause de mort et sans en exclure les sommes dont il peut être créancier envers son conjoint.

La pratique notariale suggère d’insérer des clauses excluant tel ou tel actif (l’actif professionnel par exemple), du calcul de la créance de participation.
La majorité de la doctrine estimait qu’une telle clause pouvait être constitutive d’un avantage matrimonial (La cour d’appel de Paris du 27 avril 2011 (CA Paris, 27 avr. 2011, n° 10/08818 : JurisData n° 2011-007433 ; JCP N 2013, n° 41, 1240, note N. Duchange) avait elle-même considéré qu’ une clause d’exclusion des biens professionnels était constitutive d’un avantage matrimonial.
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Ce qui soulevait un problème important en cas de divorce. En effet, selon l’article 265 du Code civil, le divorce emporte révocation de plein droit des avantages matrimoniaux qui ne prennent effet qu’à la dissolution du régime matrimonial ou au décès de l’un des époux et des dispositions à cause de mort, accordés par un époux envers son conjoint par contrat de mariage ou pendant l’union, sauf volonté contraire de l’époux qui les a consentis. Cette volonté est constatée dans la convention signée par les époux et contresignée par les avocats ou par le juge au moment du prononcé du divorce et rend irrévocables l’avantage ou la disposition maintenue.

En d’autres termes :

  • Les avantages matrimoniaux qui sont censés prendre effet après le mariage sont révoqués
  • Les avantages matrimoniaux qui prennent effet pendant le mariage sont maintenus

La question devenait donc la suivante : la clause qui modifie la consistance du patrimoine final doit-elle être traitée ?

a) comme les clauses définissant la communauté de sorte que les clauses relatives à composition du patrimoine originaire et du patrimoine final ne seraient pas révoquées de plein droit ?
b) ou comme une clause prenant effet après le mariage ? De sorte que celles-ci perdraient leur efficacité en cas de divorce ?

A cette question, la Cour de cassation (Cass 1re civ., 18 déc. 2019, n° 1826.337) apporte une réponse très claire : « Les profits que l’un ou l’autre des époux mariés sous le régime de la participation aux acquêts peut retirer des clauses aménageant le dispositif légal de liquidation de la créance de participation constituent des avantages matrimoniaux prenant effet à la dissolution du régime matrimonial. Ils sont révoqués de plein droit par le divorce des époux, sauf volonté contraire de celui qui les a consentis exprimée au moment du divorce.

Il en résulte qu’une clause excluant du calcul de la créance de participation les biens professionnels des époux en cas de dissolution du régime matrimonial pour une autre cause que le décès, qui conduit à avantager celui d’entre eux ayant vu ses actifs nets professionnels croître de manière plus importante en diminuant la valeur de ses acquêts dans une proportion supérieure à celle de son conjoint, constitue un avantage matrimonial en cas de divorce ».

La position de la Cour de cassation paraît logique, car la « communauté » n’est constituée qu’après la dissolution du régime matrimonial. En d’autres termes, l’article 265 du Code civil n’a été pensée que pour les communautés.
Il reste la possibilité ouverte par l’article 265 lui-même : « Le divorce emporte révocation de plein droit des avantages matrimoniaux qui ne prennent effet qu’à la dissolution du régime matrimonial ou au décès de l’un des époux et des dispositions à cause de mort, accordés par un époux envers son conjoint par contrat de mariage ou pendant l’union, sauf volonté contraire de l’époux qui les a consentis. Cette volonté est constatée dans la convention signée par les époux et contresignée par les avocats ou par le juge au moment du prononcé du divorce et rend irrévocables l’avantage ou la disposition maintenus ».

Par Michel Leroy – Janvier 2020

Mots clefs

Avantages matrimoniaux – Participation aux acquêts – Divorce

Thématique

Régime matrimonial

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